Economie approfondie : Travail du 6 au 10 avril : 2.2 Partie I - Comment la politique de la concurrence permet-elle de limiter les abus de position dominante et les freins à la concurrence ?


Thèmes et questionnements
2.2  - Comment la politique de la concurrence permet-elle de limiter les abus de position dominante et les freins à la concurrence ?

Notions
de terminale et acquis de première
Notions de Terminale : Abus de position dominant, cartels



Travail à faire
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Ø  
Ø Puis lisez le cours ci-dessous   :
Fiche de synthèse construite à partir des cours de collègues de SES , en particulier l’excellent cours de Jacques Ghiloni ( cours plus complet  disponible : Les politiques de la concurrence)

Introduction : La nécessité de réguler la concurrence

Ø  L’analyse libérale considère que l’intervention de l’Etat est inutile :
·         A.Smith développe le concept de la main invisible : l’intérêt individuel sert l’intérêt collectif
·         F .Von Hayek considère que l’économie de marché est la meilleure forme d’organisation économique (cf thème 1)
·         C’est l’avis de Pascal Salin (2001) :« La concurrence permet de résoudre trois problèmes fondamentaux de toute organisation humaine ». Car :
o    la concurrence incite à offrir les produits les meilleurs au prix le plus faible, de manière à satisfaire les consommateurs
o    les acheteurs bénéficient d’une plus grande liberté de choix et ils sont plus indépendants par rapport aux producteurs ;
o    La concurrence fournit un moyen d’utiliser au mieux des informations qui sont disséminées ; elle incite de plus les individus à rechercher de nouvelles informations et de nouvelles idées, de manière à être « concurrentiels ».

Ø  Cependant, le maintien des conditions de rivalité entre producteurs exige une certaine régulation par les pouvoirs publics. La politique de la concurrence consisterait alors à corriger la concurrence « imparfaite » qui prévaut dans le monde réel, pour la rapprocher du standard de la concurrence pure et parfaite. Le problème est alors de faire la différence entre une concurrence normale et une concurrence abusive. Une autre justification de l’intervention de l’Etat est basée sur le fait que les domaines dans lesquels la coopération conduit à des résultats socialement plus avantageux que la concurrence pure sont nombreux.

Ø  Les autorités de la concurrence concentrent leurs actions en 4 grands axes d’interventions:
·         2 domaines d’interventions ex post, le repérage des situations de cartels et des abus de position dominante
·         2 types d’intervention ex ante, l’analyse des impacts anticoncurrentiels des opérations de concentration et des aides publiques.

       I.            La politique de la concurrence a pour objectif de préserver ou de promouvoir la concurrence


A.    Limiter les abus de position dominante et les freins à la concurrence : les interventions ex post :

Notions à maîtriser:
Ø  Cartel de producteurs : situation de marché où les entreprises sont en collusion, en fixant notamment leurs prix et leurs quantités de manière coordonnée pour maximiser leurs profits communs.
Ø  Abus de position dominante : fait d’exploiter abusivement une situation de puis­sance économique sur un marché; par exemple, en pratiquant des prix ou des conditions commerciales inéquitables ou en freinant le développement technique au préjudice des consommateurs.

1.       La lutte contre les ententes et les cartels

Ø  La concurrence implique avant tout que chaque producteur détermine de manière autonome la politique qu’il entend suivre sur le marché. Ce n’est que si le comportement ou la marge d’action des différents producteurs sont réellement indépendants que l’effet de la concurrence se matérialise. À l’inverse, les cartels, ententes et pratiques concertées pour se répartir le marché traduisent une volonté d’éliminer la concurrence.

Ø  L’histoire du droit de la concurrence commence véritablement aux États-Unis avec la promulgation du Sherman Act, loi antitrust en 1890.
·         Fin XIXe siècle aux USA, on observe la présence de structures productives présentant des coûts fixes élevés (chemins de fer, sidérurgie, chimie, pétrole…). Pour éviter les conséquences d’une confrontation sur le marché et des guerres de prix, jugées ruineuses par les entreprises, sont mises en place des formes de cartellisation telles que le pool  (le pool est une entente entre plusieurs firmes d’une branche pour fixer le prix de vente et/ou répartir le marché, soit par des quotas de vente, soit par région) et le trust (le trust désigne le transfert des titres détenus par les actionnaires de plusieurs entreprises à un petit nombre d’hommes de confiance (trustees) moyennant un certificat de dépôt. Il est étroitement associé au développement des sociétés anonymes par actions. Les trustees, réunis en un Board of Trustees participent à la coordination des politiques des différentes entreprises. C’est John Rockefeller qui constitua le premier trust avec la Standard Oil.
·         Le Sherman Act voté par le Congrès en 1890 stipule : « Tout contrat, toute association sous forme de trust ou autre ou toute entente en vue de restreindre les échanges ou le commerce entre les différents États de l’Union ou avec les pays étrangers sont déclarés illégaux » (art. 1). « Toute personne qui monopolise, tente de monopoliser ou participe à une association ou à une entente avec une ou plusieurs personnes, en vue de monopoliser une partie des échanges ou du commerce entre les différents États de l’Union, ou avec les pays étrangers, est considérée comme coupable d’un délit » (art. 2).
·         Le Clayton Act, en 1914, a introduit une liste de pratiques prohibées : la discrimination par les prix, les accords de distribution exclusive, les ventes liées et les conseils d’administration imbriqués où siègent les mêmes personnes. Il a également favorisé les poursuites devant des juridictions civiles en introduisant des mesures pour inciter les victimes d’un comportement anticoncurrentiel à poursuivre en droit civil les responsables de ces comportements, au travers d’un principe d’indemnisation selon la règle du triplement des dommages subis.

Ø  Le paragraphe 1 de l’article 81 (aujourd’hui article 101) du Traité de la Communauté Européenne, est assez proche de l’article 1 du Sherman Act : « Sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, à l’intérieur du marché commun ». Ce même paragraphe explicite au sein des accords et pratiques concertées interdits ceux « qui consistent notamment à :fixer de façon directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction ;limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement technique ou les investissements ; répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement ; appliquer, à l’égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ; subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec l’objet de ces contrats ».

Ø  Le droit des ententes en droit français est essentiellement basé sur l'article L.420-1 du Code de commerce qui dispose, depuis une loi du 15 mai 2001 : « Sont prohibées même par l'intermédiaire direct ou indirect d'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à :Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ; Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ; Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement. »

Ø  Un exemple : Les ententes sur les vitamines
Une série d’ententes ont été dévoilées dans le secteur des vitamines, faisant intervenir deux producteurs mondiaux au titre de chefs de file, Hoffmann-La Roche et BASF. Après l’ouverture d’une enquête en mai 1999 initiée par la dénonciation d’un membre du cartel, l’instruction révélait l’existence de huit ententes ayant pour objet le partage des marchés et la fixation des prix dans le secteur des produits vitaminiques. Ces ententes ont duré dix ans (1989-1998). La Commission a infligé un montant total d’amendes de 855 millions d’euros à huit entreprises, dont 462 millions pour Hoffmann-La Roche et 296 millions pour BASF. La découverte des ententes dans le secteur des vitamines a résulté de la mise en place par la Commission du programme de clémence qui a incité la société Aventis à porter certains faits à la connaissance de la Commission, en échange de l’immunité d’amende prévue par ce programme. Cette société a bénéficié d’une immunité totale du montant d’amendes qu’elle aurait dû acquitter pour sa participation aux ententes sur les vitamines A et E. Par contre une amende a été infligée à Aventis pour sa participation à l’infraction sur la vitamine D3. Les sociétés têtes de file des cartels sur les vitamines, à savoir Hoffmann-La Roche et BASF ont ensuite coopéré avec la Commission dès les premiers stades de l’enquête en fournissant des informations cruciales sur toutes les ententes. Elles ont bénéficié de ce fait d’une réduction d’amende de 50 %.

2.       La répression des abus de position  dominante

Les pratiques mises en œuvre par une entreprise dominante et constitutives d’un abus tendent généralement à préserver la position dominante de cette entreprise sur son marché « principal » (celui sur lequel l’entreprise est dominante), ou bien sur un marché « connexe » ou « adjacent », qu’il soit verticalement ou horizontalement relié au marché principal).
Ø  Les pratiques :
·         Les pratiques de prix prédateurs: une entreprise en position dominante, capable de faire face à des pertes temporaires, met en œuvre des prix bas (en dessous des coûts). Ses concurrents, incapables de suivre des conditions de concurrence aussi intenses, sortent du marché. Une fois seule l’entreprise peut soit remonter ses prix ,soit simplement servir la demande abandonnée par les concurrents de façon à récupérer les profits perdus durant la phase prédatrice. Les prix prédateurs pratiqués sur un marché donné peuvent aussi servir à convaincre les entrants potentiels sur d’autres marchés (futurs ou connexes) que le prédateur se comportera toujours de façon agressive à l’égard de l’entrée d’un concurrent.
·         Les ventes liées : une entreprise, en position dominante sur un marché, protègerait celui-ci ou essaierait d’en pénétrer un nouveau en liant la vente de plusieurs biens. Les formes revêtues par la pratique sont très diverses : le « bundling » peut être pur (les biens ne sont disponibles qu’ensemble) ou mixte (au moins l’un des biens peut être acheté seul). La liaison opérée entre les biens peut être de nature commerciale ou technologique (c’est le cas de biens réseaux compatibles entre eux, mais incompatibles avec les autres). Le caractère anticoncurrentiel d’une telle pratique n’apparaît que si les ventes liées empêchent un concurrent au moins aussi efficace que la firme en place d’exercer son activité.
·         Remises : une entreprise dominante peut offrir de façon profitable à ses acheteurs des remises (qui devraient conduire pour elle à une perte par rapport à la vente au « prix catalogue »). Elles peuvent également diminuer la transparence sur les prix (les prix effectivement payés par les acheteurs ne sont plus nécessairement des « prix publics ») et limiter ainsi la collusion entre producteurs

Ø  Les conséquences : Plusieurs pratiques (prix prédateurs, ventes liées, remises, exclusivité) peuvent avoir le même effet sur un de ces marchés. En revanche, les effets en cause se rattachent presque toujours à l’une des trois catégories suivantes :
·         exclusion sur le marché principal : il s’agit pour l’entreprise de protéger sa position dominante, soit en contraignant les concurrents à sortir de son marché principal, soit en empêchant des concurrents potentiels d’y entrer. C’est l’objectif d’une pratique de prix prédateur
·         exclusion sur un marché connexe : l’entreprise se sert de sa position dominante sur son marché principal pour acquérir ou consolider son pouvoir de marché sur un marché connexe (bien complémentaire ou indépendant du marché principal). C’est l’objectif essentiel d’une pratique de vente liée
·         exclusion verticale : l’entreprise se sert de sa position dominante sur un marché pour interdire à une autre d’avoir accès à un autre étage d’une industrie organisée verticalement. Par exemple, une entreprise qui accorde des remises de fidélité à ses distributeurs, leur consentant des avantages importants s’ils concentrent leurs achats auprès d’elle, peut décourager ces distributeurs de vendre les produits concurrents et empêcher l’entrée d’une entreprise concurrente sur son marché.
Exemple : En 2004, la Commission européenne épinglait Microsoft pour abus de position dominante. Elle lui reprochait de profiter de son quasi-monopole sur le marché des systèmes d'exploitation pour imposer son lecteur Windows Media et ses logiciels pour serveur de groupe, au détriment de la concurrence. Elle infligeait alors à Microsoft une amende historique de 497 millions d'euros et une série de mesures destinées à corriger cette situation abusive.




Ø En conclusion  : je vous propose de m’envoyer pour vendredi le sujet suivant : Quel est le rôle de la politique de la concurrence à l'égard des cartels de producteurs ?



Il est demandé au candidat de répondre à la question posée par le sujet :
-       en construisant une argumentation ;
-       en exploitant le ou les documents du dossier ;
-       en faisant appel à ses connaissances personnelles.
II sera tenu compte, dans la notation, de la clarté de l'expression et du soin apporté à la présentation.

SUJET B

Ce sujet comporte un document.

 

Quel est le rôle de la politique de la concurrence à l'égard des cartels de producteurs ?


DOCUMENT

Après les endives, la farine, le porc, c’est au tour des produits laitiers de tomber sous le couperet de l’Autorité de la concurrence. Et le « cartel des yaourts » n’a pas bénéficié d’un régime de sanctions allégé. L’Autorité de la concurrence a condamné les fabricants de produits laitiers frais sous marque distributeur à une amende totale de 192,7 millions d’euros. Cette lourde sanction pour avoir comploté sur les prix a été dévoilée jeudi 12 mars. Le leader mondial des produits laitiers, la société mayennaise L, associée au numéro un mondial de l’agroalimentaire N, sont, du fait de leur taille, les plus touchés. Ils devraient verser au titre de leur société commune, 56,1 millions d’euros. Une somme à laquelle l’entreprise L devrait ajouter 4 millions d’euros pour son activité beurre et crème.
La société S, filiale de l’entreprise X, est, elle, condamnée à verser 46 millions. Pour la filiale de l’entreprise A, la « douloureuse » s’élève à 38,3 millions. L’addition est lourde également pour la coopérative M, puisqu’elle s’élève à 22,9 millions. Mais aussi pour des PME comme T, sanctionnée à hauteur de 1,4 million d’euros. Au total, dix entreprises sont visées par ce jugement.
Un grand nom des produits frais sort indemne de cette sanction collective. En l’occurrence Y. Non pas que cet acteur n’ait pas participé aux réunions secrètes d’ententes sur les prix et  les marchés. Bien au contraire. Mais il a décidé de ne pas faire de fleurs à ses concurrents. C’est lui qui, en accord avec son actionnaire majoritaire, l’entreprise américaine G., s’est rendu dans les locaux de l’Autorité de la concurrence le 12 août 2011, pour dévoiler le pot aux roses. Une procédure de délation qui lui permet de bénéficier d’un régime de clémence et d’échapper à toute amende […].
Ces faits ont été corroborés par la société S qui s’est, à son tour, rendue rue de l’Echelle(*) en février 2012 pour confesser les pratiques litigieuses. Une démarche qui s’est traduite par un adoucissement de peine. Alors qu’elle encourait une amende de près de 100 millions d’euros, la facture a été réduite de plus de moitié.
Trois ans plus tard, à l’heure du verdict, l’Autorité présidée par B. Lasserre estime que ces
« pratiques graves » ont perturbé le fonctionnement du marché. D’autant que les acteurs impliqués représentaient 90 % des produits laitiers frais qui pèsent près de 40 % du marché total.

Source : « Lourde amende pour le ˝cartel des yaourts˝ », Laurence GIRARD, Le Monde, le
12 mars 2015.
(*) : Il s’agit de l’adresse du siège de l’Autorité de la concurrence

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